Parmi les lieux importants du 20e arrondissement, on n’a pas encore mentionné le centre IVG de l’Hôpital Tenon, dans le quartier Gambetta/Pelleport. C’est l’une des structures qui garantit l’accès au droit à l’avortement dans l’est parisien.

Sa singularité ? Il a fermé en 2009, comme une centaine d’autres centres en France, entre 2000 et 2010, sous Chirac et Sarkozy, au nom d’une restructuration des services. Mais il a pu rouvrir en 2011, grâce à une forte mobilisation citoyenne, féministe et militante. Une exception en France, d’après Josée, membre du “Collectif pour la réouverture du centre IVG Tenon”. Avec Maryse, infirmière syndiquée (Sud Santé), elles sont revenues sur ce combat victorieux.

L’histoire commence en septembre 2009. Une militante de l’association “droits des femmes” du 20e apprend par une infirmière scolaire que le centre IVG vient de fermer ses portes, en catimini. Pas d’annonce officielle de la part de l’hôpital et les syndicats ne sont pas informés. Sur place, un papier griffonné à la main, scotché à la va-vite, renvoie les femmes vers l’AP/HP… 

L’association se mobilise immédiatement et décide d’informer la population du 20e. Elle organise un rassemblement sur le marché de la rue des Pyrénées un dimanche matin pour alerter sur ce que signifie pour les femmes l’arrêt du centre de planification et de la pratique des interruptions volontaires de grossesse : recherche d’un autre centre, perte de temps alors que l’on sait que des délais s’imposent puisque l’IVG ne peut alors être pratiquée que jusqu’à 14 semaines d’aménorrhée (12 semaines de grossesse). 

À cette première manifestation, s’en ajouteront des dizaines d’autres, la constitution de banderoles, mais aussi une occupation symbolique du hall de la maternité et des rendez-vous avec la direction de l’hôpital… Une fois le centre rouvert, le combat se poursuivra cette fois contre les intégristes catholiques qui viendront régulièrement manifester devant l’entrée. 

Aujourd’hui, entre 500 et 700 avortements y sont pratiqués chaque année, dont deux tiers d’avortements médicamenteux, en ambulatoire. Un chiffre stable depuis 10 ans en France (hors période Covid où cela a baissé). Si les habitantes de l’est parisien sont les plus représentées, certaines femmes viennent d’assez loin en Ile-de-France, car il est parfois plus facile de monter dans un train pour Paris, que de se déplacer dans le département voisin. 

Si le centre a rouvert, le collectif Tenon reste en veille, pour vérifier que tout s’y passe dans de bonnes conditions. De nombreuses menaces pèsent sur l’accès à l’avortement, comme le manque de personnel en bloc opératoire. Suite au Covid, l’ensemble des blocs n’ont pas rouvert à Tenon, et il faut souvent se battre pour y prioriser des IVG. Autre souci actuel : des pénuries constatées sur certains médicaments abortifs. Tout cela, alors même que la proposition d’inscrire le droit à l’avortement dans la Constitution est au point mort…

Pour en savoir plus

1/ La page du centre de planification, d’éducation familiale et centre IVG de l’hôpital Tenon. Lieu d’accueil, d’écoute et d’information, il prend en charge : contraception (première prise, renouvellement, oublis), contraception d’urgence, diagnostic de grossesse, dépistage et traitement des infections sexuellement transmissibles, bilan gynécologiques (frottis), I.V.G, infos sur la sexualité, les violences, difficultés familiales et conjugales…

2/ La brochure très complète sur l’histoire de cette lutte

3/ À lire sur Le Monde : Près de 8 % des centres pratiquant l’IVG en France ont fermé en dix ans. Plus de quarante ans après le vote de la loi Veil, l’accès à l’avortement reste très inégal en France. S’il n’existe pas de “zones blanches” en termes d’accès à l’interruption volontaire de grossesse (IVG), il y a en revanche “des territoires en tension dans la majorité des régions, soit du fait de la démographie des professionnels, soit durant les périodes estivales”, a admis, vendredi 27 septembre 2019, le ministère de la santé.

4/ À lire sur Le Parisien : Paris proposera bientôt des IVG chirurgicales hors les murs de l’hôpital. “D’ici la fin de l’année, les médecins du centre de santé sexuelle et de planification de la rue Levert (XXe) pourront proposer l’IVG dite “instrumentale” aux patientes. Une première dans la capitale, rendue possible par l’adossement du lieu à un centre médical”. 

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