L’art de rue, ce n’est pas seulement des fresques peintes ou des collages. Façon Petit Poucet, l’artiste Théo Haggaï sème lui des petits morceaux de pierre, auparavant taillés et gravés minutieusement. Son terrain de prédilection ? Le 20e arrondissement et le quartier de la Réunion, où il vit et où son fils grandit. Destinées à la rue et au regard des passants, ces œuvres peuvent être aussi adoptées par des curieux ou des collectionneurs. Ouvrez grand les yeux !

Comment en êtes-vous venu à l’art urbain ? “Je suis fils de comédienne et de comédien. J’ai toujours eu l’envie de créer, nourri par un environnement propice à l’expérimentation et à la recherche artistique. J’ai fait beaucoup de photos avant l’âge adulte puis, à Lyon, j’ai adopté la craie comme moyen d’expression urbaine. Je dessinais de grands cercles, au sol, que je remplissais de symboles solidaires et humanistes. Ensuite, je suis passé aux peintures murales et aux collages. Je n’avais pas d’ateliers. Je travaillais par terre, dans ma cuisine, ou à la caisse d’un petit Monoprix de quartier où j’officiais. Je dessinais sur le verso des tickets de caisse abandonnés.”  

Quelles ont été les étapes suivantes ? En 2019, j’ai déménagé à Paris. En 2020, j’ai intégré La Cale, un lieu artistique et collectif à Montrouge. J’y ai appris beaucoup. Les artistes, devenus amis, déjà présents dans le lieu, m’ont formé à différentes techniques comme la découpe du bois ou le plâtre, jusqu’à arriver à la gravure. C’est devenu très vite mon domaine de prédilection. Depuis, en atelier, je ne crée qu’à travers cette technique. Quand mon travail a commencé à intéresser des galeries et qu’il a été exposé, j’ai pu me considérer comme étant devenu artiste”.

Est-ce que vous vivez de votre art ? “Je n’en vis pas dignement, mais je ne travaille pas à côté. Si je compare ma situation actuelle à celle d’il y a quelques années, ça va mieux. Le plus important est de grandir, que ce soit « moins pire » qu’avant. La précarité des artistes est une réalité ; la nécessité de les accompagner, de les aider à concrétiser des projets est primordiale. Je ne demande qu’à pouvoir me concentrer essentiellement sur ma créativité, et cela nécessite un minimum de revenus. Certaines de mes œuvres sont vouées à retourner dans la rue, à être devinées par les passants, quand d’autres sont destinées à la vente, qui finance ma pratique.”

Pouvez-vous nous décrire vos réalisations ? “Mes œuvres sont empreintes de symboles solidaires et humanistes. C’est ma manière à moi de faire de la politique, de véhiculer des valeurs qui me sont chères et qui disparaissent petit à petit, malheureusement. Je fais des gravures, principalement sur des cailloux que je trouve dans la rue. Souvent, dessus, il y a des silhouettes humaines, que j’appelle Rêveurs, qui sont connectées les unes aux autres ou qui s’unissent pour un objectif commun : une planète saine et en paix.

Qu’est-ce qui vous inspire ? “Mon inspiration, je la puise dans mes inquiétudes face à un monde mouvant. Dans une actualité sombre et préoccupante. Dans la disparition des rapports humains. C’est cet ensemble de choses peu réjouissantes qui me motive à créer et à prôner les images que j’imagine.”

PS : Théo Haggaï cherche un atelier où s’installer de façon pérenne, si vous avez un plan n’hésitez pas à le contacter.

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