Alors que la rentrée scolaire est une période particulièrement intense pour les parents, voici une bande dessinée à mettre entre nos mains pour nourrir nos conversations sur la charge mentale. Quel lien avec le 20e arrondissement, me direz vous ? Ces autrices, Francesca Fattori et Marguerite Dégi, deux mamans solos suite à une séparation, y habitent toutes les deux (ou pas loin), l’une à Saint-Fargeau, l’autre à Place des fêtes.

Ensuite, sachez que le 20e arrondissement de Paris est celui qui comprend le plus de familles monoparentales (24,8 % des foyers dont 20,9 % de femmes seules avec enfant.s) devant le 13e arrondissement (24,1 %), le 18e et le 19e arrondissement (23,3 %). Alors que les mères absorbent la plus grosse partie de la charge mentale (merci la société patriarcale !), lors des séparations, ce déséquilibre se creuse encore, car les femmes ont le plus souvent la garde des enfants. C’est là tout l’objet de la BD “La révolte des mères – Quand le conte de fées vole en éclats, parue il y a quelques mois aux éditions L’Iconoclaste (illustrée par Audrey Lagadec). 

Le pitch ? Quittées du jour au lendemain par les pères de leurs fils, Francesca et Marguerite découvrent le quotidien des mères solos : casse-tête de la garde des enfants, pension alimentaire à négocier, charge mentale décuplée… Les deux autrices se lancent alors dans une enquête pour comprendre les raisons d’un phénomène qui dépasse leur histoire personnelle : en France, une famille sur quatre est monoparentale et 82 % d’entre elles sont gérées par les mères ». Une BD qu’on a trouvé particulièrement réussie, car mêlant récits de vie intimes, interviews avec des experts et modes d’emploi “pratico-pratiques”. Pour en savoir encore plus, nous avons posé quelques questions à Marguerite Dégi et Francesca Fattori.


Depuis quand habitez-vous à Paris, et dans le 20e arrondissement ?

Marguerite : “Je suis née et j’ai grandi à Paris. J’ai vécu dans pas mal d’arrondissements, mais le 20ème est mon quartier de cœur ! J’y vis depuis plus de dix ans”.

Francesca : “J’ai débarqué d’Italie à Paris en 2004, et dans le 20e en 2009. J’avais habité jusque là dans le 5e et je me faisais bêtement tout un film d’emménager rive droite, mais aujourd’hui je ne quitterais le 20e (et le secteur Pelleport-Saint-Fargeau-Jourdain en particulier) pour rien au monde ! On dit que le 20e a un esprit très « village », malgré son étendue, et je confirme ! et cette dimension a été salvatrice, quand je me suis retrouvée seule.

On voit dans le livre que vous vous êtes rencontrées, car vos enfants étaient dans la même crèche… est-ce que c’était dans le 20e ?

Marguerite : “Oui, c’était dans le 20ème, une crèche super du Groupe des oeuvres sociales de Belleville (GOSB) avec plein de merveilleuses femmes qui se sont occupées de nos fils quand ils étaient bébés et qui nous ont fait l’honneur d’être présente lors du lancement du livre. Même la directrice qui est désormais en retraite a fait le déplacement, on était super émues !”

Est-ce que votre séparation vous a forcé à devoir déménager ?

Marguerite : « On a eu beaucoup de chance, car non, mais de mon côté, ça a été longtemps un sujet d’angoisse absolue, car je ne savais pas si j’allais réussir à racheter ses parts de l’appart au père de mon fils. J’ai eu la chance de bénéficier d’aides au logement (c’était encore possible à l’époque quand on était propriétaire) et ai finalement réussi à le garder. Mais j’ai fait une demande en parallèle de logement social et ai envisagé un temps de partir vivre ailleurs, car je n’avais pas les moyens de me loger à Paris. »

Francesca : « Heureusement non, mais la question du logement a été à l’origine de nombreuses nuits blanches pour moi aussi. M’étant retrouvée seule en fin de grossesse avec un autre enfant petit (pour lequel je voulais limiter les perturbations, autant que possible), et ayant ma famille à l’étranger, je craignais énormément de devoir gérer aussi un déménagement et surtout de quitter mes merveilleuses voisines, ma famille de cœur. »

Est-ce que le logement à Paris, pour une maman solo, ce n’est pas la plus grosse difficulté à affronter ?

Marguerite : « C’est en effet une des difficultés majeures au vu du prix des loyers, de l’enjeu d’avoir une chambre pour les enfants. D’ailleurs, énormément de mères seules dorment dans le salon, faut d’espace suffisant pour elles. C’est très courant à Paris, mais pas seulement. Il y a une liste d’attente très longue pour obtenir un logement social, mais il ne faut pas hésiter à en faire la demande, le fait d’être une famille monoparentale peut aider même si ça n’est pas encore systématique (l’accès prioritaire aux logements sociaux fait partie des revendications de nombreuses associations de mères isolées qui militent pour la création d’un statut de parent isolé-e). »

Francesca : « J’ajouterais que le parcours du combattant pour obtenir une location est encore plus rude quand on est seule avec ses enfants, avec parfois un temps de travail réduit avec les revenus qui vont avec, les dossiers de ce type sont rarement en haut de la pile des agences immobilières. J’ai pu constater dans mon entourage que certain-e-s professionnel-le-s y font attention, mais c’est encore, hélas, une pratique assez rare. »

Aujourd’hui vous habitez toutes les deux le 20e arrondissement, est-ce que vous constatez beaucoup de mamans solo dans votre quartier ?

Marguerite : « Disons qu’on a fait partie des premières parmi celles qu’on côtoyait à l’école mais oui, il y en a pas mal. Et pour cause, à l’échelle nationale, 1 famille sur 4 est une famille monoparentale. »

Francesca : « Quand je me suis séparée, j’avais l’impression d’être la seule, mais on s’aperçoit très vite que ce n’est pas le cas ! Il y avait autour de moi plus de femmes dans cette situation que je le croyais, et j’ai été suivie aussi par d’autres voisines ou connaissances qui se sont retrouvées dans la même situation quelques années après moi. »

Est-ce que cela vous surprend que le 20e arrondissement soit celui qui comprend le plus de mères seules ?

Francesca : « Pas vraiment, car c’est l’un des arrondissements qui compte le plus d’enfants. De plus, les loyers et prix de l’immobilier moins élevés qu’ailleurs à Paris attirent pas mal de familles et permettent ensuite aux parents-solos d’y rester (ou de venir se loger) plus facilement que dans d’autres arrondissements… Idem pour les logements sociaux, qui sont nombreux dans le 20e, et dans lesquels on cherche à rester après une séparation et l’appauvrissement qu’elle entraîne. »

Des lieux du 20e arrondissement (ou ailleurs dans Paris) vous ont-ils servi de ressources lors de votre séparation ?

Marguerite : « Je dirais la maison des liens familiaux dans le 19ème et plus globalement l’association Olga Spitzer qui la gère : j’ai pu y consulter une avocate pour connaître mes droits et ceux de mon fils (et on paie en fonction de ses revenus, ce qui est très précieux, car on n’a pas forcément les moyens autrement) et faire des séances de médiation avec le père de mon fils. Le 20ème est un arrondissement très familial et la vie de quartier permet aussi d’échanger avec des femmes qui étaient déjà passées par là, que ce soit à la sortie de l’école, au square… »

Francesca : « Deux lieux-ressource qui m’ont apporté une grande aide ont été le Centre de Protection Maternelle et Infantile (PMI) de mon quartier, et l’antenne du 20e de l’association La Maison de la Médiation (qui propose, elle aussi, des séances de médiation familiale qu’on paye à hauteur de ses revenus). La PMI offre aux familles un service gratuit, mais inestimable : j’y allais déjà pour le suivi médical (jusqu’à 6 ans) de mon aîné, et après la séparation leur accueil et accompagnement a été d’un grand soutien (on peut y consulter des psychologues, participer à des ateliers avec les enfants, ou sans). Dans le 13e, il y a un endroit qui fait un travail incroyable, c’est l’association Moi et mes enfants, qui propose des ateliers et des sorties pour accompagner les familles monoparentales. Je la connais, car elle est proche de mon lieu de travail, et c’est une très belle initiative ! »

  


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