Ils seront 200 relayeurs à porter la flamme olympique à Paris. Parmi eux, Isabelle Gaignon, originaire du 20e arrondissement, directrice technique du Coopyr Sportif depuis 15 ans. On fait les présentations.

L’Est parisien, Isabelle le connaît depuis toute petite. Elle a grandi dans un immeuble “insalubre” de la rue des Chaufourniers (19e arrondissement), qui comme d’autres a été reconstruit dans les années 60/70. Expulsée dans les nouvelles cités à Sarcelles, elle revient à Paris à sa majorité pour suivre des études de théâtre. Isabelle goûte au 20e arrondissement, s’installant tour à tour boulevard de Ménilmontant, rue des Panoyaux, rue du Télégraphe, rue des Envierges et rue du Transvaal, pour ne citer qu’eux. Elle est comédienne, intermittente du spectacle, elle fait aussi de la réalisation et du montage, et en parallèle, Isabelle fait du sport.

La découverte de la savate boxe française

Elle découvre la savate boxe française dans le 20e, rue des Amandiers, à l’Académie de la boxe française. “J’en avais besoin pour me cadrer et je trouvais ça aussi intéressant pour me perfectionner pour faire des cascades dans les films. C’était lier l’utile à l’agréable”, se souvient Isabelle. Puis, on lui conseille d’aller au Coopyr, où elle commence à s’entraîner. Au fil des années, elle progresse et souhaite devenir monitrice, poussée par ses propres moniteurs. “À cette époque, ils incitaient beaucoup les féminines à prendre des responsabilités et moi, ça me convenait”. Sept ans après avoir commencé la boxe française, elle rentre en formation à l’AS PTT où elle passe tous les diplômes principaux. 

Isabelle continue tout de même la compétition, la trouvant enrichissante pour elle et essentielle pour devenir une bonne coach. Ce qui la mènera sur la première marche du podium du championnat inter-entreprises trois années d’affilée et au titre de vice championne de France technique en 2000. Elle s’entraîne dans différentes salles parisiennes et banlieusardes en tant que partenaire d’entraînement. “J’ai tourné un peu partout. Mais je revenais toujours au Coopyr parce que j’adorais la pédagogie d’Yves Gardette. Je venais écouter ses cours pour me perfectionner en tant que prof”.

Yves Gardette, fondateur du Coopyr Sportif, souhaitait former des gens avant son départ à la retraite. Voyant Isabelle motivée, il lui a proposé de la former à sa façon. Et quand il est parti en 2009, Isabelle a repris le club. “J’ai pu m’exprimer à tous les niveaux : en tant que pratiquante, en tant qu’encadrante, en tant qu’entraîneuse, en tant que coach au niveau des compétitions et tant que directrice, où là c’est plus de l’encadrement, de la formation, de la gestion, de la recherche de financement, de la mise en place d’une politique sportive… tout ce qui tourne autour du développement du club”. Intermittente du spectacle étant un métier très incertain avec des hauts et des bas, elle a surfé sur la vague du sport, sa deuxième passion et mis de côté sa carrière artistique.

Un amour pour les arts martiaux

Isabelle aime la savate, mais pas que. En réalité, c’est tous les arts martiaux qu’elle apprécie. Elle a pratiqué l’aïkido pendant deux ans, s’est initiée au judo pour apprendre à chuter, à la capoeira, à la boxe thaï, à la boxe anglaise, à l’escrime. Elle a aussi 10 ans de canne de combat derrière elle : Isabelle prépare d’ailleurs son monitorat de canne de combat pour enseigner. Pour elle, les arts martiaux sont une “façon de canaliser une certaine violence. Ils permettent d’être bien dans sa peau, et ils peuvent servir à se défendre et à protéger l’autre s’il y a besoin”.

La boxe française, devenue indispensable à la vie d’Isabelle, marque plus de points que les autres arts martiaux. “C’est un art de vivre. La savate boxe française est un état d’esprit qui m’a conquis, car il correspond à notre esprit occidental. Tous les arts martiaux amènent à un bien-être, mais la savate m’a plus séduite. Il y a une esthétique, une notion de distance, tu boxes soit à distance de poing, soit à distance de pied, c’est très aéré. Et moi qui suis un petit moustique, ça me va bien”, livre Isabelle.

Le Coopyr, un tremplin vers le haut niveau

Créé en 1969, le Coopyr compte une championne et un champion du Monde, une championne d’Europe, six champions de France, une vainqueur du Tournoi de l’Avenir. Des champions, Isabelle Gaignon en a vu passer dans sa salle de boxe : Alexis Nicolas, champion du monde de kick boxing, et Maïmara Lawson sont tous deux sportifs de haut niveau.

De gauche à droite : Alexis Nicolas, Isabelle Gaignon, Maïmara Lawson et Kelly Atanasio au Coopyr Sportif

Porter la flamme, un symbole pour Isabelle

“Les honneurs ne se demandent pas mais ne se refusent pas”, aime se dire Isabelle. C’est la mairie du 20e qui a proposé sa candidature à la mairie de Paris. En septembre, elle reçoit un appel de Pierre Rabadan, adjoint à la Maire de Paris en charge du sport, des Jeux Olympiques et paralympiques, qui lui propose de porter la flamme. Pour elle, c’est beaucoup de reconnaissance. “Ils reconnaissent tout ce que le Coopyr et mon engagement au sein de cette structure a apporté au 20e. On est un des clubs les plus titrés du 20e. Et en termes de travail social auprès des jeunes, on est un des plus performants aussi”.

“Les honneurs ne se demandent pas mais ne se refusent pas”

Isabelle Gaignon fait partie d’un relais de 24 personnes, toutes issues du mouvement sportif. Pour des raisons de sécurité, les 200 relayeurs parisiens ne savent pas encore où ils vont courir. Isabelle a une petite préférence… je vous laisse deviner laquelle. Belleville ! Seule étape dans le 20e du parcours de la flamme. Invitée à la cérémonie d’ouverture en tant que relayeuse, Isabelle n’a pour autant pas acheté de places pour les JO en raison du prix. Mais le club a obtenu 10 places pour la boxe anglaise à l’Adidas Arena.

Isabelle Gaignon et Pierre Rabadan à l’Hotêl de Ville le 30 avril dernier

Quand la savate boxe française s’invite aux JO

La savate boxe française n’est pas un sport olympique mais il y a 100 ans, lors des JO de 1924 à Paris, elle était sport de démonstration. 100 ans plus tard elle revient à Paris et sera à nouveau sport de démonstration et d’initiation. Dans le cadre des festivités des JO, le Coopyr fait une animation au Stade Louis Lumière du 26 au 28 juillet pour faire découvrir au plus grand nombre la savate boxe française.

Heureuse de participer à ce moment historique, au début la directrice du Coopyr ne réalisait pas vraiment. “Mais on se prend au jeu, c’est évident. Comment ne pas se prendre aux Jeux… Olympiques ?” ironise t-elle. Ce qu’elle aime aux JO c’est le message de paix qu’ils véhiculent et aussi la performance. Elle a hâte de voir ce que va donner la France. Un top 3 ou un top 5 ? et de voir si la pression va être bien gérée par les athlètes.

“On félicite toujours le vaincu, parce qu’on sait que sans lui, il n’y a pas de combat. Je dis toujours à ma salle, à ceux qui ne font pas de compétition, que si vous n’étiez pas là il n’y aurait pas de champions, parce qu’on s’entraîne et on se forme ensemble. Le haut de la pyramide n’existerait pas sans sa base. Je trouve que la petite fonction de relayeur, c’est une façon de créer un événement pour remercier toutes ces personnes qui œuvrent pour le sport”.

Fanny Velay


Qu’est ce que la Savate boxe française ? Ce sport typiquement français s’est développé au XIXe siècle après la révolution française avec cette idée de construire une nouvelle société où le port d’armes est interdit. Pour se défendre il ne restait plus que les mains et les pieds. La savate s’est développée au fil du temps et c’est aujourd’hui un art. On boxe avec les pieds, et un peu avec les mains.


 

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