Belleville : la section handball du collège Jean Baptiste Clément, une réussite scolaire et sportive

Depuis septembre 2015, la section sportive handball du collège Jean Baptiste Clément, classé en REP (Réseau d’Education Prioritaire), accueille une vingtaine de filles et garçons par niveau. En partenariat avec le Paris Sport Club, ce projet concilie réussite sportive et scolaire dans un établissement où certains élèves sont issus de milieux défavorisés.

« Démarque toi », « c’est bien Nina ! », « on change les défenseurs ». On est mercredi matin, il est 10h30 et les 5ème du collège Jean Baptiste Clément s’entraînent comme toutes les semaines au gymnase des Pyrénées sous l’œil de Paul Serinet, coordonnateur de la section. Au programme du jour, travail de 2 contre 2.

Une pratique sportive intensive

Les élèves de la section pratiquent quasiment tous les jours de la semaine. Selon l’âge et le genre de l’enfant, les jours d’entraînement varient, mais le rythme reste le même pour tout le monde : 2h avec Paul Serinet, 1h minimum avec le Paris Sport Club, 1h d’entraînement avec l’AS (Association Sportive) sur le temps du midi, et les matchs certains mercredi après-midi. Jusqu’en 5ème les entraînements sont mixtes, puis les filles et les garçons sont séparés pour une raison de développement physique qui n’est pas le même à cet âge-là. En principe, les élèves sont inscrits au Paris Sport Club pour permettre une pratique plus régulière. De nombreux élèves de la section jouent au Paris Galaxy, une entente dont fait partie le Paris Sport Club qui regroupe les meilleur(e)s joueurs et joueuses de Paris.

Pour lui, la section est un complément de formation. « Former des élèves intelligents, bon au niveau moteur, qui ont une capacité de lecture et qui ont envie de défendre : c’est la ligne directrice de ma formation. Elle sort un petit peu des carcans trop technicistes de la fédération. C’est un bon complément quand tu es handballeur en club. C’est même une chance. Mon objectif est de créer une section qui est reconnue pour sa formation. Il faudrait que les meilleurs joueurs du Paris Sport Club soient à la section sportive », explique t-il. Il reste tout de même clair quant aux objectifs de la section. « Le but n’est pas que de former des professionnels. S’il y a un ou deux élèves qui ont envie d’aller vers cette filière-là, leur donner les clés pour qu’ils réussissent. Sans oublier les élèves qui n’ont pas envie de se projeter sur du haut niveau, qui ont juste envie de progresser et de prendre du plaisir ».

Il est au contact d’une vingtaine d’écoles primaires du 20e, notamment avec l’école La Mare et l’école 293 Pyrénées. « C’est un travail très important parce que c’est ça qui va déterminer les futurs élèves de la section », explique le coordonnateur. Il poursuit : « on partage un créneau d’AS, un entraînement sur le temps du midi. Il y a un travail de transmission avec les élèves, les filles en 6ème et 5ème qui forment les CM1 et CM2 ». Quasiment toutes les 5ème de la section viennent du 293 rue des Pyrénées. C’est le cas d’Ethel, qui a découvert le handball avec Paul Serinet en primaire et venue à JBC exprès pour la section : « S’il n’y avait pas la section, je ne serais pas dans ce collège. J’aime le sport, ça me motive de venir en cours ». Le recrutement est possible à n’importe quelle classe pour permettre d’augmenter le niveau de la section. Certains joueurs du Paris Sport Club ont intégré la section en 3ème.

Une rigueur sportive et scolaire

Les élèves de la section sportive sont répartis dans les différentes classes de l’établissement, où ils suivent les mêmes cours que les autres élèves. « Si un élève ne travaille pas bien, ce n’est pas possible qu’il aille faire les matchs. Il y a une vraie communication avec les professeurs des autres disciplines, avec les CPE, avec les enseignants, avec le principal, avec toute la communauté éducative. Il y a 70 élèves concernés sur 380 élèves, c’est quasiment un quart du collège qui sont à la section, donc il faut qu’ils rayonnent dans l’établissement. Ils doivent faire rayonner le collège », appuie Paul Serinet. Souvent délégués, engagés dans la vie du collège, éléments moteurs sur les ateliers proposés comme la chorale ou “JB Climat”, les élèves savent qu’ils ont un rôle à jouer au sein du collège et que la section doit servir à l’établissement.

Le sport a son rôle à jouer dans la réussite scolaire de certains élèves. Un moyen pour eux de s’investir au sein du collège s’ils sont dans un contexte familial compliqué et d’être valorisé. Les entraînements et les matchs organisent le temps des élèves et leur permettent de déconnecter quand il le faut.

La naissance de la section

L’ouverture de la section remonte à l’année scolaire 2015/2016. C’est Lucile Godeau, professeure d’EPS du collège à l’époque, qui est à l’origine du projet. Depuis 8 ans, l’Association Sportive handball du collège est forte, avec des résultats. « Il y avait déjà une culture handball dans le collège grâce à Lucile », affirme Guillaume Voelckel, professeur d’EPS du collège. Professeure au collège depuis huit ans et elle-même joueuse de handball au Paris Sport Club, Lucile trouvait intéressant d’aller plus loin dans la pratique du handball de ses élèves. L’idée était de créer un projet commun entre une fédération et le monde scolaire. Elle a parlé de cette envie à la présidente du Paris Sport Club, Isabelle Penafiel. À deux, elles ont créé la première section sportive handball de Paris au sein d’un collège.

En raison d’un projet de mutation, Lucile Godeau a quitté le collège Jean Baptiste Clément et Julien Tauziède, professeur d’EPS depuis 3 ans au collège à ce moment-là, a repris le flambeau. Au fil des années, la section a évolué jusqu’à la création d’un “poste spécifique” pour faire avancer la section sportive. Son diplôme de prof de sport en poche, Paul Serinet arrive de Rennes en septembre 2020 à Jean Baptiste Clément et prend les rênes de la section. Joueur de handball depuis ses 6 ans, lui il fait toutes les catégories jeunes du côté de Chartres, il accède au pôle de la ville (une structure de formation destinée aux jeunes joueurs), avant de rejoindre la Bretagne en 2015 où il intégrera le centre de formation du Cesson Rennes Métropole Handball et où il jouera deux saisons avec la N1 et la D1, puis deux saisons au Cercle Paul Bert Rennes en N1. Quand il arrive à Paris, il rejoint la D2 de Massy. Il est contraint d’arrêter à la fin de la saison car le rythme est très dense. Il opte finalement pour la N3 du Paris Sport Club.

Une expérience de vie

Pour Paul Serinet, la section sonne comme une plus-value pour les élèves : elle apporte au niveau sportif, mais aussi au-delà. Elle permet aux élèves d’évoluer en groupe, ils apprennent à vivre des moments collectifs et à gérer leurs émotions. Elle leur apprend l’exigence, l’humilité, la solidarité. La section, c’est aussi des rencontres humaines lors des matchs UNSS, car ils affrontent des élèves d’autres collèges. « La section ne s’arrête pas aux matchs et aux entraînements. C’est un état d’esprit. C’est assez complet, ça les fait grandir. Ça leur apprend à gérer un équilibre de vie. Ils apprennent à s’organiser et ça leur servira toute leur vie », raconte Paul Serinet.

Un système qui porte ses fruits

Si certains arrêtent le handball après le collège, d’autres vont plus loin dans la pratique du sport. Stana et Dylane, toutes les deux nées en 2005, ont été sacrées championnes de France avec le Paris Galaxy en 2022. Cannelle, née en 2004 et faisant partie de la première génération de la section, et Stana évoluent en Nationale 2 au Paris Sport Club, Samuel (2006) évolue cette saison en championnat de France à Bois Colombes. Pour l’instant, aucun élève de la section n’est devenu joueur professionnel, mais ça ne serait tarder. On a hâte de voir le premier !

Fanny Velay (membre de la première génération de la section)