LOVE STORIES – Cela fait un moment que l’on souhaite réaliser des portraits d’habitants du 20e arrondissement. Proposant à tous ceux qui le souhaitent – et qui ont une histoire à raconter, d’apparaître sur Mon Petit 20e. Anahita et Sergio ont répondu à notre appel.

“On s’est rencontré, là où l’on n’aurait pas dû être”. Elle, c’est Anahita. Née en Iran, elle est venue en France rejoindre son père qui terminait un doctorat d’ethnologie. Suite à la révolution islamique de 1979, sa famille n’a pu retourner vivre en Iran comme elle l’avait décidé. Son père étant considéré comme opposant politique, il a obtenu le statut de réfugié politique. Lui, c’est Sergio. Né au sud du Mexique dans la région de Tabasco (“comme la sauce pimentée !”), il a atterri à Paris en 1993 pour poursuivre des études de droit et de sciences politiques.

Leur rencontre a eu lieu en 1997, dans un stage de français, à la fac de Censier (aujourd’hui Sorbonne-Nouvelle), alors que tous deux n’en avaient pas vraiment besoin. Sergio y était pour y accompagner sa sœur, moins à l’aise que lui. Anahita s’y était rendue pour observer l’enseignement de la langue aux étrangers. Une carrière de prof qu’ils épouseront tous les deux par la suite, au moins pour un temps. Le 20e arrondissement, c’est le lieu de Paris où ils se sont mariés et où ils ont eu plusieurs adresses : d’abord rue de Charonne chez Anahita, puis villa Stendhal. Enfin, rue des Vignoles au retour d’un long séjour au Mexique, où ils se sont installés entre 2004 et 2010.

Le fruit de leur amour, c’est Ulysses, 20 ans. “C’est lui qui doit être au centre de l’histoire”, insistent-ils. Né en 2001, après une grossesse compliquée, le nouveau-né passe sa première année de vie à l’hôpital. “On savait qu’il avait une maladie rare, il était en retard sur tout, mais ça a été très long et très difficile à diagnostiquer”, raconte Anahita. Atteint du syndrome de Costello, Ulysses a marché à 4 ans, 3 mois et 10 jours. Il n’a utilisé sa bouche pour manger qu’à l’âge de 6 ans.

La photo lui a permis de “voir son enfant”

Quand, il a 3 ans, ses parents partent vivre au Mexique. “On s’est senti rejeté en France, aucune école maternelle ne voulait de lui (car il était nourri par sonde et ne marchait pas). On a eu besoin de changer d’air. C’est là-bas, dans la chaleur et la lumière, que j’ai fait beaucoup de photos de lui. Avant cela, c’était trop douloureux”, se souvient Anahita, qui depuis a une pratique quotidienne de la photo. L’un des traits du syndrome étant une chevelure bouclée, jusqu’aux 5 ans d’Ulysses, elle a préféré couper très courts ses cheveux comme pour ne pas voir la maladie. Commencer à le prendre régulièrement en photo lui a permis de “voir son enfant” et de le montrer. Le rendre visible car “notre société préfère tenir à distance les personnes en situation de handicap”.

Aujourd’hui, Ulysse a les cheveux longs (et ça lui va si bien !), comprend autant le français que l’espagnol et apprend à lire (grâce à l’instruction en famille). La communication alternative et augmentée (CAA) lui permet de mieux communiquer en utilisant les signes, ainsi qu’une tablette avec synthèse vocale. Qu’espèrent-ils à l’avenir ? “C’est qu’Ulysses ne soit pas toujours celui que l’on n’attend pas. Qu’on cesse d’interroger systématiquement ses capacités et que ses droits à la participation  à la société (éducation, loisirs, travail…), en bref ses droits humains, soient respectés. “On nous envoie toujours ailleurs. Si on allait à chaque fois au tribunal pour discrimination, on aurait plusieurs procès en cours”. Heureusement, certains ailleurs font preuve de plus d’ouverture.

Stagiaire à la bibliothèque Louise Michel

Ainsi Ulysses fait du chant et de la danse contemporaine depuis 5 ans au conservatoire (dans le 13e arrondissement car celui du 20e a refusé de l’inscrire, expliquent ses parents), de la batterie à Ménilmusique, une école de musique du 20e (qui a pour devise “la musique pour tous”). Il est aussi accueilli en stage tous les mardis après-midi depuis fin octobre à la bibliothèque Louise Michel, rue des Haies. C’est d’ailleurs dans ce lieu, important pour eux, que nous les avons rencontrés. Ulysses cherche d’ailleurs d’autres lieux culturels, associatifs ou commerces qui pourraient l’accueillir en stage et où il pourrait apprendre de nouvelles choses et connaître de nouvelles personnes. La vie d’Ulysses ne fait que commencer.

Photos : Gaëlle Guse

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