Aller à la rencontre de la jeunesse du 20e arrondissement, tel est l’objectif de cette série de portraits réalisée au Foyer de jeunes travailleurs (FJT) des Hauts de Belleville, rue du Borrégo. Parmi les 87 résidentes et résidents, Valiha, 24 ans, nous a ouvert la porte de son studio.
Difficile de se faire une place dans la chambre de Valiha, véritable caverne d’Ali Baba. À 24 ans, cette aspirante cascadeuse pour le cinéma ramasse, dans la rue, tout ce qui pourrait servir comme élément de décor pour un prochain court-métrage (palettes en bois, chaise bistrot..). Sans oublier qu’elle stocke aussi des costumes, des bâtons pour se battre et des armes factices. Le cadeau qu’elle attend pour Noël ? Une épée. Quoi de plus normal ?
D’origine malgache, Valiha (prénom qui se prononce “Vali” en français) est née dans le 14e arrondissement de Paris, a grandi à Sevran (93), avant de partir faire son collège à “Mada”, dans la capitale Antananarivo, et de revenir en France pour le lycée et ses études supérieures. Après un bac L, c’est sa passion pour la K-pop qui la pousse à se lancer dans des études de coréen. Mais après trois ans sur les bancs de la fac, elle se rend compte que ce qu’elle veut vraiment faire, c’est du cinéma.
Passion torches humaines
“Je m’interdisais d’y aller, car je n’avais pas de connaissances et que je ne viens pas du tout de ce milieu-là”, explique-t-elle. “Autour de moi, le cinéma, c’était pour les gens qui ont grandi une caméra à la main, alors que moi, ce n’est pas cela qui m’intéresse”. Direction un salon du cinéma, pour faire le point sur cette vocation nouvelle. Sur l’affiche d’un stand, elle voit une personne s’extraire d’un feu. C’est la révélation. Ce qu’elle rêve de faire, c’est de la cascade.
Sans hésiter, elle s’inscrit dans une école de cascade, une formation coûteuse (pour laquelle elle a fait un prêt) notamment à cause de l’assurance d’un montant de 15 000 €, nécessaire à la protéger elle, mais aussi les autres. Surveillante dans un collège, sur le temps scolaire, les stages de cascades se déroulent, eux, à chaque vacances, sur des terrains militaires. Au programme : des coups-de-poing, de pieds qui doivent être crédibles, des chutes de hauteur, des acrobaties, de la pyrotechnie (explosif, impact de balle, arme à feu, arme blanche…), torche humaine, percussion par un véhicule. Rien d’une vie banale.
Cascadeuse en Corée un jour ?
Depuis 2021, Valiha a investi son premier chez elle, un studio au sein du Foyer de jeunes travailleurs Les Hauts de Belleville, dans le 20e arrondissement. Sur son temps libre, elle s’exerce dans une compagnie qu’elle a co-créée avec de jeunes cascadeurs (La Compagnie 85), comme elle. On peut parfois les voir à l’œuvre à Montmartre. Son rêve pour la suite ? Devenir cascadeuse dans l’un des pays les plus en pointe en la matière, le Royaume-Uni ou l’Asie (en tant que jeune femme noire, c’est plus facile à l’étranger, car il y a plus de rôles, plus de diversité”). Sa familiarité avec le coréen pourrait alors être un atout…
Photos : les clichés sont signées Gaëlle Guse, une photographe spécialisée dans le portrait, qui vit dans le 20e arrondissement de Paris.
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